2018 ◊ Cyclisme augmenté (cliché)

Vélodrome National

Quoi de plus symbolique qu’un cycliste en pleine action, pour illustrer la page d’accueil du site internet du Vélodrome National !

Situé à Montigny-le-Bretonneux dans les Yvelines et ouvert au public en 2014, le vélodrome sert régulièrement de centre d’entraînement pour l’équipe de France sur piste. Comme le rappelle le logo à gauche, ce complexe sportif deviendra au cœur de l’été 2024, lors des Jeux Olympiques organisés à Paris et en Île-de-France, le temple des épreuves de cyclisme sur piste.

Cette image contient plus qu’une photo en grand format : elle inclut aussi une courte animation d’un pistard tout en muscle, en plein effort sur son vélo de compétition. Visage déterminé, regard concentré vers un but victorieux. L’expression « avoir la tête dans le guidon » prend ici tout son sens.

Cette image a de quoi surprendre le public. Cet athlète ultra bodybuildé est à des années lumières du physique longiligne des coureurs cyclistes sur route, que l’on peut notamment côtoyer au passage du Tour de France, ou de courses internationales d’un jour. Sa morphologie, semblable à la musculature impressionnante d’un Hulk devenu soudainement cycliste, nous évoque instinctivement les super-héros de Marvel. Ce sport serait-il pratiqué par des surhommes ?

Pour tous les aficionados du sport cycliste, cette image est une caricature réussie de ces champions atypiques, pour lesquels une victoire dans ces épreuves en indoor se construit en amont dans les salles de musculation. Une force titanesque au service d’un sport populaire depuis plus d’un siècle. Car pour réussir dans cette discipline, il est définitivement admis dans le milieu sportif que l’athlète doit posséder un physique hors norme. Augmenter sa puissance maximale et développer l’explosivité, tels sont les objectifs de ces héros sportifs des temps modernes.

Mais cette caricature pose bien évidemment d’autres interrogations. Et celle-ci en particulier : le sport professionnel est il encore humain ? Les champions d’hier, semblables aux communs des mortels, semblent disparaître des enceintes sportives au profit d’êtres se rapprochant davantage de l’« extraterrestre ».

Si la représentation est un peu (volontairement ?) gonflée, elle a le mérite de nous questionner sur l’évolution du sport professionnel. Le sportif est-il voué à devenir un homme augmenté pour accroître sa performance ? D’autres sports, tels que le rugby, la natation ou l’athlétisme, ont déjà érigé leurs athlètes au rang de demi-dieu. Avec le risque de tomber dans l’écueil du dopage technologique, génétique ou lié à la prise de médicaments. Si le sport véhicule toujours des valeurs essentielles telles que le goût de l’effort, l’esprit d’équipe, le respect de soi, de l’adversaire et des règles, la recherche de la performance sportive est une préoccupation quotidienne, qui obsède sportifs, entraîneurs et presses spécialisées. Bien loin du précepte humaniste édicté au début du 20^ème siècle – l’important, c’est de participer -, cher aux fondateurs des nouveaux Jeux Olympiques.

L’image sur la page principale du site invite le public à venir voir s’affronter des « monstres sacrés » du cyclisme sur piste. Communément acceptés et encouragés par les spectateurs et les différents acteurs du monde sportif, l’entraînement et la pratique ont désormais pour vocation d’augmenter les performances, d’optimiser le rendement des athlètes et d’améliorer leurs corps à l’extrême. Les limites sont continuellement repoussées grâce à la science et aux techniques. Le cas du coureur sud-africain Oscar Pistorius est le plus bel exemple de l’apport des technosciences dans le sport.

La prochaine étape semble mener les futurs champions vers le transhumanisme. Un rétropédalage est-il encore possible ?

Rédigé par Jan-Philippe Dubroca

Site Internet : Vélodrome National
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